Archives du Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete 

L'origine du CCCTP remonte à 2008, lorsque j'ai eu droit à une visite guidée par Chantal Selva et Jean-Charles Hyvert du chantier du Centre Culturel qui devait voir le jour dans les anciens locaux de la Marine en face de l'actuel rond-point Jacques Chirac à Papeete. Beaucoup de belles promesses pour rien. 

On m'a ensuite raconté l'histoire du serpent de mer du Centre Culturel Polynésien : depuis plus de trente ans le projet revient, de gros budgets sont dépensés en études, plus de deux milliards de Fcfp pour le projet de Centre Culturel de Raiatea par exemple, 274 000 000 de francs pour la seule année 1998, et au final jamais de Centre Culturel. 

En 2008 je me suis lié avec deux drôles de personnages, Paskua et Lili Oop, qui venaient d'ouvrir un Espace Contemporain des Arts du Pacifique à Bora Bora. En 2010 ils ont fondé la première coopérative d'auteurs pour la production audiovisuelle et multimédia en Polynésie. Il se sont fait beaucoup d'ennemis et ont dû vite prendre le large. 

En 2012 en compagnie de Julien Magre j'ai rencontré le groupe de sculpteurs tatoués Chief Miko, Pitore et Purotu à Moorea, où on avait échoué sur la plage d'Opunohu après avoir perdu l'hélice du bateau à bord duquel nous allions rejoindre Moana Heitaa à Taha'a. C'était l'anniversaire de Pitore et une magnifique cérémonie. 

Quelques semaines plus tard on a été invités à exposer et participer à un séminaire organisé par le Service de la Culture et du patrimoine polynésien au Hilton de Moorea. On a beaucoup parlé de la mise en place d'un statut de l'artiste en Polynésie. J'ai tenté d'aborder le sujet du Centre Culturel, on m'a fait comprendre qu'il ne fallait pas faire de vagues.

J'ai commencé à beaucoup fréquenter Chief Miko qui avait de grandes visions, et à prendre conseil auprès de Jean-Louis Poitevin, que je connaissais depuis l'époque où j'avais été en résidence à l'Institut français d'Innsbruck dont il était alors le directeur. En septembre 2013 on a créé le CCCTP. Notre idée était d'obtenir un lieu pour pouvoir créer et exposer en toute liberté. On voulait un lieu de 200 où 300 mètres carrés qu'on entretiendrait nous-mêmes, dans l'esprit des squats d'artistes, pas un Centre couteux et des millions de budgets d'études. 

On a tout de suite obtenu une date de la Maison de la culture de Papeete pour une exposition en février 2014. On voulait frapper fort et Chief Miko à ouvert l'exposition par une cérémonie qui a marqué les esprits. On a programmé des créations in situ, des diffusions de vidéos expérimentales et une table ronde à laquelle nous avons convié les responsables de la direction de la culture. Natea Montillier a répondu à l'invitation et les échanges ont été nourris. 

L'exposition Action Directe CCCTP a été très médiatisée en Polynésie, une dizaine d'articles en une semaine, des émissions de radio et deux émissions spéciale de Fare Maohi sur Polynésie la première, l'antenne locale de France Télévision. Pendant une semaine les autocars des écoles venant faire visiter l'exposition aux élèves ont défilé. Chief Miko sculptait sur place toute la semaine, à la tronçonneuse pour dégrossir puis à l'herminette pour les finitions. Il produisait une très forte impression sur les enfants. 

Malheureusement les deux principaux journaux de l'époque, la Dépêche de Tahiti et les Nouvelles de Tahiti ont disparu depuis, et avec eux leurs sites web. Du coup il ne reste aucune trace disponible de cet évènement, à moins d'avoir accès aux archives, ce qui ne doit pas être simple. Je viens de retrouver le texte de Jean-Louis Poitevin dans un dossier, que je n'avais pas relu depuis 2014. J'ai été frappé par sa pertinence. Des photos de la plupart des articles avaient été partagées sur la page facebook de l'association à l'époque. Plusieurs photographes avaient immortalisé l'évènement. Voici donc les archives du CCCTP, une association qui a implosé au bout d'un an et après trois expositions, mais dont l'action n'aura pas été vaine. En effet, après avoir mis en place une carte d'artiste professionnel, en 2017 le pays a ouvert Hamani Lab, un atelier partagé situé dans une ancienne usine de Tipaerui où les artistes professionnels peuvent travailler collectivement. 

La plupart des photos illustrant ces archives sont de Shigeo Kobayashi et de Stéphane Sayeb.

Archives du CCCTP

Programme du Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete

Texte du docteur Jean-Louis Poitevin, 2014

Programme pour une association transdisciplinaire 

Teva Victor, Massimo Colombini, Jonathan Bougard et Julien Magre
durant le protocole de Chief Miko,
ouverture exposition Action Directe CCCTP 2014, Tahiti TFTN

Aujourd’hui la culture 

Nous vivons une époque dans laquelle les distinctions entre pratiques culturelles ne sont plus appréhendées en termes de différence de valeur et de niveau mais en termes de complémentarité. 

La valeur d’une pratique artistique (à ne pas confondre avec la valeur symbolique ou monétaire d’une œuvre) n’est plus classée dans l’échelle sociale en référence au système de représentation élitiste d’une société bourgeoise (héritière de la révolution française), mais en fonction de ses liens potentiels avec d’autres pratiques sur un même territoire et dans l’espace globalisé de la communication.

Le CCCTP entend œuvrer à la pérennisation des cultures locales en soutenant leur mutation en relation avec le monde d’aujourd’hui. Pour cela CCCTP entend pratiquer et promouvoir de manière concertée des pratiques artistiques et culturelles qui permettent d’embrasser l’ensemble du champ culturel. 

Désir de peinture et de sculpture 

Peindre et sculpter sont des activités centrales qui assurent à une communauté une représentation d’elle-même sans laquelle elle n’existerait pas. Mais les images techniques, photographie, cinéma et vidéo sont devenus aujourd’hui un vecteur aussi important, même si leur fonction est aussi différente. Ce sont cependant ces images techniques qui permettent de faire le lien entre les différentes strates du passé, un passé parfois immémorial et les projets à venir. En effet, l’enjeu de l’activité du CCCTP est bien d’établir une base de rencontre entre pratiques ancestrales et traditionnelles, comme le tatouage ou certains types de sculptures, la danse et les rituels, pratiques artistiques et enjeux contemporains. 

La vitalité d’une culture passe par sa diffusion. C’est même la possibilité de son existence qui en dépend. Mais elle suppose surtout de trouver un ou des lieux qui lui soient dédiés. Le CCCTP entend ouvrir ses portes à ceux que concerne la mise en perspective de la culture comme ensemble de pratiques dont la vocation est d’assurer à un peuple la possibilité de s’inventer une image vivante de lui-même. La diffusion d’images est aujourd’hui le vecteur majeur de cette conception d’une culture ouverte sur le monde, mais elle ne peut exister que si des pratiques réelles sont rendues possible. C’est pourquoi l’ouverture d’un lieu dédié à la création s’impose comme point nodal d’une évolution vivante. 

Les images techniques permettent de faire le lien entre les pratiques culturelles, mais elles constituent aussi, en tant que telles, une pratique à part entière. C’est pourquoi il est impossible de séparer la réalisation de peintures ou de sculptures de la réalisation de films de type documentaires ou créatifs. La force des uns ne cesse de rétroagir sur la forme des autres. 

Le CCCTP entend conférer au désir d’image une place centrale dans la vie culturelle et sociale de Tahiti. 

Passé, histoire et devenir 

C’est en s’appuyant de manière inconditionnelle sur la tradition que le devenir culturel de Tahiti pourra se déployer et être reconnu dans le monde contemporain. C’est en ayant recours à des moyens technologiques actuels qu’elle pourra se faire connaître et reconnaître. Ce n’est pas un paradoxe mais le fruit de l’évolution de la planète vers une société mondialisée dans laquelle les cultures minoritaires peuvent prétendre parvenir à se faire reconnaître dès lors qu’elles entrent dans la danse mondiale des échanges culturels. 

Les cultures traditionnelles, contrairement à une image trop souvent colportée, ne sont pas figées. Elles évoluent simplement plus lentement si l’on se réfère aux mesures du temps en cours dans les mégapoles, mais plus profondément si l’on se réfère à la vitesse de sédimentation des éléments nouveaux dans un cadre traditionnel. La rencontre avec les formes dominantes de la culture planétaire a donné lieu essentiellement à des rapports de domination et de soumission. Le champ culturel est aussi le domaine d’exploration des échanges pacifiés. La situation entre cultures dominantes et cultures traditionnelles évolue vers un respect mutuel impliquant néanmoins une appropriation nécessaire non tant des standards culturels dominants que de certains de leurs outils. L’élément aujourd’hui inévitable, ce sont les images et en particulier les images vidéo, qui constituent le vecteur incontestable d’une transmission planétaire possible. Ce qui importe aujourd’hui, c’est qu’il est possible de présenter dans le monde entier toutes les formes culturelles pourvues qu’elles aient été converties en images. L’important, c’est qu’elles le soient aussi à partir de leur position réelle dans leur propre territoire. Cela s’accompagne de manière inévitable et saine de combats pour une double reconnaissance, reconnaissance de la tradition comme tradition, reconnaissance des pratiques comme éléments vivants de la culture actuelle, contemporaine. 

Moana Heitaa

Les tensions sont inévitables, dans l’espace culturel d’origine entre les tenants d’un immobilisme de la tradition et des acteurs engagés dans l’évolution des formes traditionnelles. Au cœur de la problématique, on trouve en première ligne la question des moyens permettant de les faire exister et de les partager dans les différents cercles d’influence, qu’ils soient locaux, régionaux, internationaux ou planétaires. C’est entre ces pôles que les pratiques culturelles doivent naviguer afin d’exister, de se développer, et de se faire connaître. C’est cette ambition que porte le CCCTP. 

Enjeux 

Des tensions existent entre les réseaux culturels et les autorités surtout lorsqu’elles persistent dans leur rôle de gendarmes de la bienséance. Néanmoins, ces autorités sont conscientes de la forte valeur ajoutée de la sphère culturelle même si elles ne sont pas toujours prêtes à déployer des moyens qui seraient à la hauteur de l’enjeu. 

Le travail du CCCTP doit s’orienter dans plusieurs directions qui peuvent au premier abord sembler contradictoires mais qui sont en fait absolument complémentaires. Rester lié à la tradition est absolument vital. Entretenir des relations ambivalentes avec les cultures dominantes y compris avec ce qui dans les zones dominantes peut être perçu comme des courants critiques voire révolutionnaires. 

 Il faut aussi prendre en compte les différences de « régime » entre les pratiques culturelles selon le point de vue d’où on les appréhende. Il y a une grande différence entre l’usage que font pour elles-mêmes les cultures dominantes de cultures extra européennes, comme par exemple pour ne prendre qu’un exemple, le recours à la culture africaine chez certains peintres du premier tiers du XXe siècle et l’usage que ces cultures font de leur propre passé et de leur propre histoire aujourd’hui sur leur propre territoire. Si l’on ne peut effacer l’histoire, nul n’est contraint de se courber devant elle. Les choses ont changé depuis quelques décennies et c’est sur ces nouvelles bases d’une reconnaissance mutuelle du passé, de ses bienfaits comme de ses méfaits, qu’il importe de partir. 

     

Fare Maohi CCCTP

Le CCCTP a aussi d’autres buts. Il vise moins à entrer en conflit culturel avec l’Europe ou les USA qu’à promouvoir les fondements de la culture tahitienne dans leur relation actuelle avec les formes contemporaines de l’art et de la création. Cela implique inévitablement un recours aux nouvelles technologies. Ce recours est un point majeur, car c’est là que se joue la nouvelle forme d’autonomie et d’inventivité des culturels traditionnelles. Outre leur dimension d’expérience vécue incompressible, elles peuvent imposer des relations inventives et nouvelles aux outils technologiques. Elles peuvent permettre d’en transformer l’usage. Elles peuvent devenir des vecteurs d’invention. 

Ce pari est difficile, mais il est le seul qui permette à la fois une évolution de la tradition qui ne soit pas une fixation dans une vision muséale et figée des choses, et une distance vis-à-vis des formes dominantes de l’art international forme sophistiquée de la domination culturelle qui se poursuit malgré tout. 

En choisissant ces modes d’action liés à la tradition, le CCCTP assume ses racines et y trouve la sève vitale dont l’art a besoin. En participant à l’évolution et à l’affirmation de ces pratiques, le CCCTP s’impose comme un espace de création majeur. Les pratiques traditionnelles doivent à la fois d’être enregistrées et médiatisées. Elles doivent donc accepter la donne technologique. Mais elles doivent le faire à partir de leur point de vue. 

Ainsi, c’est un nouveau rapport aux images que le CCCTP doit inventer et c’est ce qu’il a commencé à faire. Filmer des tatoueurs en train de pratiquer leur art, ou des sculpteurs en train de travailler c’est rendre possible une certaine forme de diffusion. Transformer des pratiques de dessin ou de peinture en dessin animé, c’est produire un type d’image qui est à la fois expression de la culture locale et traditionnelle et pratique répondant à des normes internationales.

Être artiste à Tahiti aujourd’hui 

Cette situation pose une question nouvelle : qu’est-ce et que veut dire être artiste aujourd’hui à Tahiti ? Deux cas de figure doivent retenir notre attention. Il y a les artistes originaires de Tahiti qui à partir d’une pratique traditionnelle la conduisent sur des voies contemporaines de respect et de renouvellement. 

Le Collectif 

Il y a des artistes installés à Tahiti qui ne sont ni des artistes locaux, ni des représentants de l’art international officiel. Venus là dans une approche de rencontre et de confrontation positive entre leur pratique et la réalité culturelle et sociale qu’ils ont découvert appris à connaître et à aimer, ils sont des vecteurs essentiels pour permettre à cette articulation complexe entre local et planétaire de se mettre en place de manière créatrice et respectueuse. 

Dans un cas, l’enjeu est de propulser la tradition vers de nouvelles formes, de nouvelles techniques, de nouveaux publics, de nouveaux enjeux. Dans l’autre cas, il s’agit de décaler le regard sur ses propres pratiques locales et traditionnelles dans une « amoureuse critique » à la culture qui les accueille.

Un phare sur l’océan 

Si, à l’échelle de la planète, le territoire est minuscule, à Tahiti les enjeux autour de la culture sont immenses. Les quelques exemples de projets ou d’idées suffiront à montrer combien ces îles perdues peuvent devenir un phare sur l’océan du XXIè siècle. 

Revue. 

Un séminaire autour de la sculpture et du tatouage traditionnel avec des intervenants choisis. Les actions seront filmées et mises en ligne. 

Ces séminaires seront des dialogues. Le premier aura lieu autour de la sculpture, avec un sculpteur de tikis tahitiens sur bois, chef Miko, et Teva Victor, travaille la pierre.

Ce séminaire sera accompagné de manifestations comportant des happenings et des créations en direct. Pour la sculpture en direct, chef Miko, se propose de travailler à la tronçonneuse. D’autre part, une séance de tatouage traditionnel, au peigne est prévue. 

Projets 

L’enjeu est donc l’emploi dans les pratiques traditionnelles de techniques nouvelles, comme par exemple faire un tiki tahitien à la tronçonneuse. 

Mais, c’est aussi de présenter des œuvres réalisées ici par des artistes non tahitiens, comme Julien Magre qui réalise des calligraphies sur papier. Un autre aspect important de la démarche du CCCTP tient en ceci qu’il a des contacts à l’étranger, en Afrique en particulier ou Jonathan Bougard expose un grand nombre de ses œuvres consacrées à la vie tahitienne. Les toiles qui seront exposées en Afrique, se seront surtout des images de danseuses de ori tahiti, même si le modèle est une japonaise.

Mais aussi au Japon ou le ori tahiti est populaire. On compte pas moins de 300 écoles de ori à Tokyo. C'est une richesse dont on n’a sans doute pas conscience, y compris à Tahiti même, et c’est elle qu’il faut faire prospérer. 

Enfin, un projet de courts-métrages pour la télévision montre bien que cette prise de conscience est en train de se faire et que l’ambition du CCCTP est non seulement belle et utile mais absolument légitime.

 Jean-Louis Poitevin

CCCTP Action directe

Article de la Dépêche de Tahiti du 19 septembre 2013.

Culture. Première réunion du Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete. 

Un collectif d'artistes au service de l'intérêt général. 

La première réunion de travail du "Centre de Création Contemporaine Teroronui (Grand Cerveau en tahitien, NDLR) Papeete (CCCTP) s'est déroulée, jeudi soir, dans la salle des commissions de l'hôtel de ville de Papeete. Cette nouvelle association loi 1901 vient d'être créée par des artistes issus de domaines très différents. Le statut sera publié dans le prochain numéro du Journal Officiel de la Polynésie française.

"Notre association a pour but de réaliser des actions d'intérêt général dans le champs culturel, plus particulièrement dans la création contemporaine, en partenariat avec les collectivités locales et internationales, dans le cadre d'opérations itinérantes ponctuelles, explique le président de ce collectif, Jonathan Bougard, bien connu dans le milieu pour ses tableaux et aussi ses films documentaires. Ces actions dans le champ culturel comprendront l'éveil artistique de l'enfance, la présentation au public d'oeuvres poétiques, dramatiques, chorégraphiques, musicales, de chroniques écrites, dessinées, filmées, l'organisation d'expositions d'art et le soutien à l'exportation de la création contemporaine locale dans les domaines de l'image, de la mode et toute hybridations des procédés de narration, écrits, sonores et visuels. "

A la recherche d'un local

Mais pour l'heure, le plus important est d'obtenir un local pour des expositions de peinture, sculpture et des projections de films. L'association recherche un lieu d'une superficie comprise entre 200 à 300 mètres carrés minimum, comprenant une surface pour le travail des artistes et l'autre surface pour effectuer les expositions accessibles à tout public. "Il n'y a pas de lieu  pour exposer nos créations et nous avons une proposition à faire au ministère de la Culture, car pour nous, l'idéal est d'avoir un immeuble, dit Jonathan Bougard. A titre personnel j'ai été reçu par le service de la culture et du patrimoine l'an dernier, à l'époque de l'ancien gouvernement. Cette fois-ci, on va retourner les voir avec comme message : on a besoin d'espace pour travailler et pour exposer. A travers notre association, dont on vient de constituer le bureau avec quatre membres, on est prêts à étudier toutes les propositions."

D'après Jonathan Bougard, la salle d'exposition de la maison de la culture n'est pas suffisante et les expositions qui se déroulent là-bas "n'ont pas un rayonnement international". Cette association serait soutenue par des universitaires en Europe qui ont des réseaux en Chine et aux Etats-Unis. Elle aurait aussi établi une connexion avec l'Afrique francophone, notamment avec le Sénégal. 

Tous les artistes qui souhaitent joindre cette association peuvent le faire dès aujourd'hui en contactant le président. Le siège social se trouve pour l'instant à Faa'a. Pour être un membre actif, il faudra verser une cotisation annuelle de 1000 Fcfp par personne.

De notre correspondant JH

Article des Nouvelles de Tahiti du mardi 25 février 2014

ACTION DIRECTE CCCTP

Une exposition d'art contemporain à la maison de la culture

Le Centre de Création Contemporaine Teroronui (le grand cerveau en tahitien) lance sa première exposition, à partir d'aujourd'hui et jusqu'au premier mars, à la Maison de la Culture. Une façon de mettre en lumière la sculpture contemporaine à Tahiti, mais aussi la peinture, la calligraphie, la photographie, etc... Interview de Jonathan Bougard, président de la toute nouvelle association. 

Comment est née l'idée du Centre de Création Teroronui de Papeete ?

Beaucoup de projets de centres de création contemporaine sur le territoire n'ont jamais aboutis. Fin 2012, nous avons étés invités à un séminaire d'art contemporain et à une exposition collective organisés par le Service de la Culture et du Patrimoine, à Moorea. Avec quelques uns des artistes rencontrés à ce moment-là, à Opunohu, on s'est réunis en association en septembre dernier. Nous avons la volonté de faire quelque chose qui n'existe pas ici, de faire un centre de création contemporaine. Cette exposition est notre tout premier évènement. 

Le texte de présentation de l'exposition est signé Jean-Louis Poitevin. Quel est son rôle dans l'exposition ? 

J'ai beaucoup dialogué depuis plusieurs mois avec Jean-Louis Poitevin, critique d'art, docteur en philosophie, écrivain et ancien directeur d'instituts culturels français. Je le connais depuis longtemps et il a bien compris ce qu'on est en train de faire, il décrit bien les enjeux et le programme de l'association. 

Qui sera présent à l'exposition ?

Il y a une dizaine d'artistes, adhérents de l'association. C'est axé sur la sculpture et l'art plastique traditionnel. Ce qui vient d'ici, ce n'est pas le dessin où la peinture sur toile, mais la sculpture et le travail de la pierre. On parlera des matières et il y aura un après-midi de rencontres et de dialogues autour de la sculpture, jeudi, avec Chief Miko, un artiste puissant qui a grandit à Hawaï, qui a travaillé en Chine et qui va travailler en direct, à la tronçonneuse, pour réaliser un grand tambour, un pahu, et bien d'autres oeuvres. Il y a aussi Teva Victor, qui sculpte la pierre, Massimo Colombini, un photographe sportif, et le calligraphe Julien Magre. L'exposition réunit également des photographies aériennes de Matarai, faîtes grâce à des drones, des tirages photo de tatouages traditionnels réalisés au peigne par Moana Heitaa, une ou deux oeuvres de Pitore, un sculpteur de Moorea, installé dans la baie de Opunohu, et des photomontages de Yanick Margerit. 

Personnellement j'expose des dessins, les "Chroniques Paumotu", des petites histoires qui parlent de la vie aux Tuamotu sur lesquelles je travaille depuis un moment. Il s'agit d'une série de courts-métrages dessinés, complètement inédits, qu'on peut retrouver dans la Dépêche chaque dimanche. Il y aura la projection du pilote, ainsi que quelques vidéos d'artistes, des films faits avec un appareil photo, qui se prêtent bien à une diffusion dans ce cadre. 

L'exposition se poursuivra au Sénégal ?

J'ai une exposition personnelle à Saint-Louis du Sénégal le mois prochain, et ils diffuseront des photos et des vidéos de l'exposition du groupe CCCTP. Il devrait y avoir une lecture du texte de Jean-Louis Poitevin à cette occasion. C'est un premier pas en direction d'un échange entre les deux pays.

Au-delà de cette première exposition, vous êtes-vous fixés des objectifs ? 

Notre première exposition a lieu à la maison de la culture. J'ai déjà exposé là l'an dernier (du 23 au 27 avril 2013 NDRL) avec Eric Vébé que j'avais rencontré à l'exposition collective organisée à Moorea. Mais un de nos objectifs principaux est d'obtenir un local, un lieu pour travailler, un lieu d'exposition de la création contemporaine locale, où on ferait des lectures, des happenings, des actions de théâtre avec la présentation au public d'oeuvres poétiques, dramatiques, musicales et chorégraphiques. 

Propos recueillis par Patricia Dybman

Article de la Dépêche de Tahiti du 26 février 2014

PAPEETE Le Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete expose

Bouillon de cultures

Action directe. Non, ce n'est pas le retour du groupuscule terroriste des années 1980 (en France) mais le nom de la première exposition du Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete (CCCTP) récemment créé (voir encadré). Ce collectif pluridisciplinaire regroupe une dizaine d'artistes traditionnels et contemporains d'origines diverses. Pour la première fois, nombre d'entre eux exposent à la salle Muriavai de la maison de la culture (TFTN) jusqu'au 1er mars.

Tiki à la tronçonneuse

Alors pourquoi "Action Directe"? "Car Miko va notamment sculpter en direct toutes les journées de l'expo, et jeudi après-midi il y aura également un premier séminaire sur la culture, qui sera filmé," explique Jonathan Bougard, dessinateur au long cours, que les lecteurs de la Dépêche du Dimanche connaissent bien, avec ses "Chroniques Paumotu" diffusées dans votre hebdomadaire (lire encadré). "Teva Victor et Chef Miko partageront leurs points de vue avec un docteur en esthétique, autour de la création" précise ce dernier. Un tatoueur traditionnel (au peigne) devait également faire le déplacement de Taha'a pour des séances en direct, mais malheureusement il ne pourra pas le faire. Le Chef Miko, qui a vécu 30 ans à Hawaï, par contre, sculptera ses tiki à la tronçonneuse, devant les visiteurs. Ces derniers pourront également découvrir les désormais célèbres sculptures de Teva Victor, membre du collectif, les photos aériennes de Matarai, de superbes photos de Massimo Colombini, ancien photographe officiel du comité organisateur de la coupe du monde de beach soccer, qui nous a livré récemment un superbe livre sur l'équipe des Tiki Toa, qui ont enflammé To'ata. Massimo nous présente de superbes clichés sur le récent championnat de France de Boxe qui s'est déroulé à Tahiti. De nombreuses vidéos de performances artistiques viendront compléter le tableau des nombreuses oeuvres exposées. Bref, une exposition hétéroclite qui vise large et qui ne manquera pas de titiller l'oeil des visiteurs.

Quoi qu'il en soit, ce collectif ne manque ni de volonté, ni de projets. "Si nous nous sommes fédérés, c'est pour pouvoir faire plus" précise Jonathan. "Nous allons mettre un site web en ligne bientôt, bilingue, avec l'aide d'un critique d'art" et "entend ainsi conférer au désir d'image une place centrale dans la vie culturelle et sociale de Tahiti". Une preuve en est, alors que l'économie frémit de nouveau, que l'art, tous les arts, donc la culture au fenua, ne se sont jamais arrêtés de bouillir. 

CCCTP, kesako ?

Le Centre de Création Contemporaine Teroronuid de Papeete ou CCCTP est un collectif transdisciplinaire, dont l'objectif est d'oeuvrer à la pérennisation des cultures locales tout en soutenant la relation avec les moyens de communication modernes. Ses pratiques culturelles et artistiques sont aussi riches que variées et mettent en oeuvre ce croisement des époques et des cultures qui signale la vitalité d'une expression artistique. Cette association est née en septembre 2013 et présente les oeuvres de ses artistes pour la première fois à la maison de la culture. Par ailleurs, l'association recherche un local mi-atelier, mi-lieu d'exposition, pour "exposer plus librement et davantage". 

Christophe Cozette

Article de la Dépêche de Tahiti du 28 février 2014

Papeete, jusqu'à demain à la maison de la culture

Une exposition pour favoriser les échanges culturels

Le collectif du Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete veut mélanger culture traditionnelle et médias modernes pour faire rayonner les traditions dans le monde entier.

Le Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete (CCCTP) est une jeune association née en septembre 2013.

Son but : fédérer les artistes afin de favoriser les projets ambitieux, former les jeunes et faire rayonner leur travail grâce aux technologies modernes et à travers des échanges culturels et artistiques avec le reste du monde. 

"L'idée est venue il y a deux ans, quand (notre groupe d'artistes d'origine occidentale) a rencontré, à Moorea, les artistes Pitore, Purotu, Chief Miko et le tatoueur Moana Heitaa. C'était à l'occasion d'une exposition organisée par le Service de la Culture. Tout c'est passé en un dimanche. Nous avons beaucoup parlé, échangé sur les savoirs traditionnels et ceux qui les possèdent, qui sont difficiles à rencontrer. Avec l'association, nous qui venons de la culture occidentale, pouvons nous réunir avec ceux qui possèdent les savoirs traditionnels pour multiplier les échanges", explique Jonathan Bougard, membre fondateur du CCCTP. 

Des sculptures et des rencontres

L'association organise sa première exposition à la salle Muriavai de la maison de la culture, jusqu'à demain. Neuf artistes y contribuent avec photos, dessins et vidéos pour accompagner les sculptures de Teva Victor, qui travaille la pierre, et Chief Miko, sculpteur de tiki, tambours traditionnels et pirogues. 

Les sculptures de Teva Victor, qui laissent apparaître des visages ou des personnages au milieu de la pierre brute, jouent sur la forme naturelle du matériau pour en faire émerger l'esprit. Dans son oeuvre, chaque pierre a une âme, et c'est le sculpteur qui la révèle, à sa façon. 

Chief Miko, lui, travaille le bois. Il aime façonner des instruments de musique, car lui-même est musicien. Les pirogues qu'il a construites ont également cet authentique esprit polynésien, tout en étant modernes. 

L'exposition se combine avec des rencontres et tables rondes sur les enjeux de la création contemporaine et la préservation des cultures traditionnelles, en particulier en abordant l'enjeu des débouchés pour les artistes. Le collectif va bientôt transférer des photos et vidéos de l'exposition au Sénégal, dans l'optique -toujours- de favoriser les échanges culturels. Une exposition plus ambitieuse en métropole est également dans les cartons. 

Mais la priorité est de trouver un local pour y installer un atelier d'artistes, où le collectif pourra exposer ses oeuvres, discuter et avoir un espace pour enseigner aux jeunes. 

Chief Miko : la tradition sans conflit

Chief Miko est un sculpteur tahitien qui voyage à travers toutes les îles du Pacifique et au-delà. Plus à l'aise en tahitien et en anglais qu'en français, il a rejoint le collectif car il croit en ses valeurs. "J'ai rejoint le groupe avant sa création officielle, avec la relève des sculpteurs de Moorea. Mon but est de renouveler la sculpture en rencontrant les artistes de Rapa Nui, Hawaï, Micronésie ou d'Amérique, les indiens en particulier. Je souhaite que chacun puisse trouver son identité, quer l'on partage et enseigne notre culture aux jeunes, et que le public y gagne une compréhension plus profonde de notre patrimoine. On a des maîtres, ici, qui ont partagé leur savoir avec nous. Pour cette exposition, le protocole est important, avec cérémonie du kava et un évènement pour la fermeture. On veut qu'il y ait beaucoup d'ethnies dans le collectif : Polynésiens, Français, Chinois, Japonais, Américains. Et des femmes aussi. Tous unis dans l'art. J'espère que nous allons trouver un endroit pour installer un atelier d'artistes, pour enseigner aux jeunes notre tradition, sans conflits."

De notre correspondant Jacques Franc de Ferrières

Lundi 23 septembre 2013, Chief Miko à la une de la Dépêche de Tahiti

Article de la Dépêche de Tahiti du 23 septembre 2013

CULTURE. Un sculpteur se lance dans l'exportation de ses créations vers l'Asie

Chief Miko exporte ses tiki en Chine

Le sculpteur Michel Toofa Krainer, plus connu sous le nom de Chief Miko, s'est lancé un défi : réaliser une centaine de tiki en bois pour le marché chinois.

Ce matin, il va livrer les premières créations à la société  Cowan, chargée de les affréter en Chine.

Son frère, qui s'occupe de sa promotion en Chine, est convaincu qu'il y a un marché pour les tiki tahitiens.

"Dès lundi (aujourd'hui NDLR) j'emmenerai mes tiki à la société Cowan qui va s'occuper de l'acheminement jusqu'en Chine. C'est la première fois que je travaille ainsi." Confiait, vendredi dernier, Michel Toofa Krainer, dit Chief Miko, 54 ans, un sculpteur professionnel qui aime son métier jusqu'au bout des doigts. Dans le passé, il avait déjà construit des grandes pirogues polynésiennes comme faisaient autrefois les ancêtres pour effectuer des traversées dans le Pacifique, notamment autour du triangle polynésien. Cet homme a grandi à Hawaï, où il a vécu pendant 30 ans, avant de revenir au fenua. "J'espère pouvoir réaliser jusqu'à 100 tiki tahitiens pour les envoyer en Chine. Je les réalise tout seul." Dit Chief Miko.

Pour y parvenir, il utilise les machines électriques, mais aussi des outils plus manuels, afin de donner une touche plus locale aux tiki. Pour les troncs d'arbres, Chief Miko compte sur son entourage, à l'image de ses cousins qui effectuent des élagages, ou encore, tout simplement, sur la chute des arbres.

"Lorsque mes cousins coupent des arbres, je vais chercher les troncs moi-même. Je mets une semaine pour finir un grand tiki. Pour les petits, il faut un jour pour les sculpter sur le bois, mais deux jours pour terminer entièrement le travail. (...) Je suis indépendant, je ne travaille pas pour le gouvernement, tous les jours je sculpte chez moi," confie ce père de famille de cinq enfants, dont deux vivent avec lui à Arue, les autres étant à Hawaï. 

Michel ne réalise que des tiki tahitiens, pas marquisiens, la différence est de taille pour les connaisseurs : "C'est le look, la tête, le gabarit aussi, les yeux, le sexe, et on a des motifs différents. C'est le même principe avec le tiki marquisien, mais le style change. On est plutôt proches des tiki des Tuha'a Pae et même des îles Cook que des Marquises."

Son travail a été reconnu sur la scène internationale, notamment à Hawaï, aux Etats-Unis. Pour la Chine, c'est grâce à un réseau de contacts qu'il a pu se faire connaître. Et il semblerait que les chinois aient découvert avec grand intérêt ses réalisations. 

Chefs coutumiers à Hawaï

Dans le garage de son nouveau fare, côté mer à Arue, qu'il occupe depuis un mois avec son épouse et ses enfants, trône une grande pirogue en bois qu'il a construite en 2007. Sur son corps, Michel s'est fait tatouer de nombreux motifs qui rappellent les temps anciens, mais aussi sa passion pour la navigation ancestrale. Michel est trilingue. Il parle anglais, français et tahitien et a toujours baigné dans la culture polynésienne d'où il a acquit ses techniques. Un savoir-faire qu'il pourra transmettre à son fils, aujourd'hui âgé de trois ans et qu'il a fait baptiser selon le rite des anciens à Hawaï. Il a même déjà rencontré à plusieurs reprises les chefs coutumiers de l'archipel américain, avec qui il garde de très bons contacts. "Il faut montrer que tu es capable de faire quelque chose. J'ai été adopté par mon grand-père, qui fut le dernier chef coutumier, et je vais souvent à Hawaï, mais je ne suis pas américain." Mais Polynésien, c'est sûr, à la conquête de la Chine...

Au coeur d'un film documentaire

Ce sculpteur tahitien pas comme les autres est actuellement au coeur d'un reportage documentaire  que réalise Jonathan Bougard, le président de l'association Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete (CCCTP), dont le bureau a été constitué, jeudi dernier, à la mairie de Papeete. (lire notre édition du samedi 21 septembre 2013). Ce film documentaire évoquera la vie et le travail de Michel Toofa Krainer, qui a connu des hauts et des bas. A travers ce film, ce sera un récit que Miko pourra laisser à la future génération et surtout à ses enfants qui grandissent en voyant leur papa à l'oeuvre chaque matin devant un tronc d'arbre. Ce long-métrage pourrait faire l'objet d'une sélection des films officiels qui seront en compétition au prochain FIFO (Festival International du Film Documentaire Océanien), dont la onzième édition aura lieu du 3 au 9 février 2014 à la maison de la culture.

De notre correspondant JH

Le film Miko, le chef voyant : 

Trois questions à Michel Toofa Krainer, dit Chief Miko, sculpteur professionnel de Arue

Combien de tiki allez-vous expédier dans un premier temps en Chine ?

"Il y a sept tiki en tout. Quatre grands, des médiums, un petit. Le petit, c'est pour mettre dans les bureaux afin d'orner un peu le lieu de travail."

Qui va réceptionner la marchandise ?

"C'est mon frère Martin qui va tout réceptionner. C'est lui qui fait la promotion en Chine. Il travaille dans la compagnie Tahiti Go, consacrée au noni. Il est en Californie, les tiki seront d'abord envoyés là-bas avant de partir en Chine. Mon frère Martin est très connu dans le Pacifique pour être le roi de la vanille. Il va s'occuper de tout cela, moi je les envoie uniquement chez Cowan. Il me connait et il est en train de m'aider."

D'où vous est venue cette idée d'exporter les tiki ?

"Je créé des choses pour l'économie de notre pays, je suis indépendant, pas indépendantiste. Il y a beaucoup de gens qui me connaissent comme Makau Foster, Eriki Marchand et tant d'autres issus de la culture. Je créé pour l'avenir de mon peuple autochtone. 

Propos recueillis par JH

Article le Nouvelles de Tahiti, 26 février 2014.

Chief Miko

Il expose à la Maison de la culture jusqu'au 1er mars

Michel Toofa Krainer, plus connu sous le nom de Chief Miko, sculpte des tiki. Un hommage à la culture polynésienne qu'il souhaite promouvoir. Il est présent à l'exposition Action Directe CCCTP 2014 à la Maison de la culture, qui se déroule jusqu'au 1er mars. Il fera une démonstration de son talent de sculpteur en live.

Alors que l'artisanat polynésien est de plus en plus exploité par les pays voisins, la Chine en premier lieu, mais aussi par l'Indonésie ou les Philippines, qui n'hésitent pas à importer au fenua tifaifai, colliers et autres, Michel Toofa Krainer, lui, exporte ses tiki, jusqu'en Chine. L'homme est bien décidé à faire briller la culture tahitienne hors de nos frontières. Et quoi de mieux que le tiki pour cela ? "Ce n'est pas la vahine le symbole de Tahiti, ce n'est pas la Hinano, c'est le tiki,"  affirme le sculpteur. "Le symbole du premier homme créé, l'image du seigneur", selon lui. Et des tiki, il en fait à profusion dans son atelier de Arue. Un "gagne-pain", confie-t-il.  Des petits et des grands, qui traversent les océans : l'année dernière sept tiki ont rejoint l'empire du milieu, dont quatre grands représentant les points cardinaux, et déjà, d'autres pays importent ses créations, dont le Mexique. "C'est lancé, et ce n'est qu'un début," assure Chief Miko, qui entend ainsi promouvoir son peuple et sa culture à travers le monde. 

La culture tahitienne, il baigne dedans depuis tout petit,  symbole vivant de l'artiste engagé pour la reconnaissance de son peuple, l'homme a vécu à Hawaï pendant 30 ans. C'est là qu'il a réalisé ses premières oeuvres, à 14 ans. En 2000 il a refait ses valises. "C'était le moment de revenir", confie celui qui se veut proche de ses racines, et pour qui le monde actuel réserve encore bien des difficultés : "Je n'aime pas le "computer", ça m'embête, je n'y arrive pas. Notre langue, c'est la langue, on communique en parlant." Affirme-t-il.

S'il ne rechigne pas à utiliser toute sorte de matériaux, le bois a sa préférence. Il a déjà construit des pirogues polynésiennes, comme faisaient ses ancêtres, de qui il tire ses idées : "Ce sont mes ancêtres, mes grands-parents qui m'inspirent", affirme-t-il. Aujourd'hui on peut encore voir certaines ce ces pirogues chez lui. Avec cet amour du bois, c'est tout naturellement qu'il s'est spécialisé dans les soins aux arbres, son grand-père lui transmettant son savoir alors que le jeune homme n'a pas encore vingt ans. "Je suis certifié arboriste par la Société Internationale d'Arboriculture" (ISA), révèle l'artiste, qui regrette que le diplôme ne soit pas reconnu au fenua. Et quand il ne sculpte pas ? "Je m'occupe de mon fa'apu, of course," affirme avec gourmandise celui qui a apprit l'anglais à Hawaï et qui associe curieusement les deux langues dans une même phrase. 

Le sculpteur, qui se revendique de "famille royale", montre fièrement sur son corps les tatouages commencés en 1994, année où il prend le nom de Chief Miko. "Ces tatouages, c'est l'histoire de mon peuple, je la porte sur moi". Il tient à préciser que ça n'est pas marquisien. "Les marquisiens ont leur patrimoine, ici on a notre patrimoine. Ca c'est tahitien." Mais, concède-t-il, on est tous polynésiens."

Depuis hier il est présent à l'exposition du Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete (CCCTP), à la Maison de la culture. Même s'il s'est forgé une solide réputation sur la scène artistique polynésienne, il y participe de façon désintéressée. "Ce n'est pas pour moi, mais pour les autres que je suis là. Pour l'avenir des jeunes. Je suis content de voir qu'il y a d'autres artistes". Il n'est toutefois pas là pour faire de la figuration. Pour lui, "Chacun a un don, et ça, c'est mon don." Qu'il met en pratique toute la semaine pour sculpter en live lances, tiki, to'ere et autres instruments du patrimoine polynésien. 

Patricia Dybman

Article des Nouvelles de Tahiti, 1er mars 2014

Julien Magre, un calligraphe à Tahiti

Autodidacte, Julien Magre s'est mis à la calligraphie il y a plus de vingt ans. Il expose jusqu'à aujourd'hui avec le Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete (CCCTP) à la Maison de la culture.

Calligraphie : étymologiquement, l'art de bien former les caractères d'écriture. Mais si cela peut s'apparenter à l'écriture, pour Julien Magre, il s'agit plsu "d'esthétique", affirme-t-il, et c'est ce qu'il tente de montrer depuis le début de la semaine à la Maison de la Culture, au cours de l'exposition Action Directe CCCTP 2014. Tel qu'il la pratique, la calligraphie "n'a aucune ressemblance avec les caractères qu'on peut trouver généralement. Ce sont des caractères imaginaires", explique-t-il. Ou comment transformer l'écriture en art. 

Julien Magre a toujours aimé créer. Mais, confie-t-il, il est devenu calligraphe par hasard. Pour ses douze ans, son cadeau d'anniversaire est pour le moins original. Son père lui offre un  stylo de calligraphie et il se lance dans cet art difficile, pour ne plus jamais arrêter. "Mon père, qui a fait l'école des Beaux-Arts, et est ingénieur en mécanique, voulait voir si j'allais poursuivre et il ne s'est pas trompé. Ca m'a plu, et j'ai continué", raconte cet autodidacte, qui a appris la calligraphie par passion. Autant dire qu'à l'heure du tout informatique, sa démarche peut en surprendre plus d'un.

En Métropole, le jeune homme faisait cela par plaisir, en dilettante,  "c'était plus de la recherche personnelle", explique-t-il. Mais depuis son arrivée à Tahiti, il y a deux ans, ce technicien de réseau eau à la recherche d'un emploi a un rêve : faire de la calligraphie et en vivre. "Si je vois qu'il y a des opportunités qui se présentent à moi, ça me plait, surtout que je vois un réel engouement." En attendant de devenir le "Picasso de la calligraphie", il habite sur un voilier et s'adonne à la navigation de plaisance. "C'est quand même l'endroit idéal pour pratiquer ce genre d'activités", affirme l'artiste, qui s'est lancé sur l'eau sans rien y connaître. Petit marin deviendra grand, il a démarré par la Presqu'île, puis a mouillé à Moorea, avant de naviguer jusqu'à Rangiroa, mais, avour-t-il, "depuis deux ans j'apprends encore le métier". 

Pour l'instant, il travaille au feeling, affirme-t-il, sans modèle, s'attelant juste à former les différents caractères d'une écriture de façon esthétique. "J'essaye de me détacher et de faire à partir de rien, pour essayer d'arriver à quelque chose."

Au niveau de l'inspiration, confie-t-il, "je me suis aperçu que je reproduisais certains caractères arabes, certains caractères chinois, et même certains caractères qu'on peut retrouver sur les tatouages polynésiens, sans en connaître la signification". Celui qui déteste par-dessus tout le mensonge et la mauvaise foi le dit avec honnêteté, il trouve dans cet art un moyen d'évasion : "C'est très égoïste, mais c'est reposant de pratiquer ça. J'y vois une espèce de méditation. Ca peut relever un peu de l'automatisme. J'ai la feuille devant moi et j'essaye de m'échapper au maximum, de ma vider complètement," passant parfois une heure pour réaliser une oeuvre, et jusqu'à cinq heures pour d'autres.

Sa rencontre à Papeete avec Jonathan Bougard, le président du tout nouveau Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete (CCCTP), lui a ouvert de nouvelles perspectives : "On a décidé de faire avancer les choses", annonce-t-il. La suite du parcours on la connaît : depuis mardi, et jusqu'à aujourd'hui, il expose à la Maison de la culture. Une première exposition qui en appelle d'autres. 

Patricia Dybman

Article les Nouvelles de Tahiti 28 février 2014

Journal de Radio 1, interview de Teva Victor :

CULTURE

LA SCULPTURE AU CENTRE D’UNE TABLE RONDE

Elle a été organisée à l’initiative du collectif CCCTP, le Centre de Création Contemporaine Teroronui Papeete, Elle a réuni jeudi plusieurs acteur culturels tels que Natea Montillier ou encore Teva Victor. Ensemble, ils se sont intéressés à la question de la transmission du savoir. L’importance d’un retour aux sources, de la création de lien entre les personnes, afin que l’art continue de se partager. Teva Victor nous livre son analyse, il est au micro de Léo Paul Pont. Ce collectif souhaite voir la culture polynésienne s’exporter à travers le monde. Il  présente une exposition collective à la maison de la culture jusqu’à ce midi.

http://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2014/03/JOURNAL-7h30-ok.mp3

Tahiti Infos le Jeudi 20 Février 2014 

Happening: "Action directe CCCTP" à la salle Muriavai

Te Fare Tauhiti Nui – Maison de la Culture vous informe qu’elle accueille dans la salle Muriavai du 25 février au 1er mars un collectif à la philosophie audacieuse : Action directe CCCTP
Le Centre de Création Contemporaine Teroronui Papeete ou CCCTP est un collectif transdisciplinaire, dont l’objectif est d’œuvrer à la pérennisation des cultures locales tout en soutenant la relation avec les moyens de communication modernes. Ses pratiques culturelles et artistiques sont aussi riches que variées et mettent en œuvre ce croisement des époques et des cultures qui signale la vitalité d’une expression artistique.

Le CCTP entend ainsi « conférer au désir d’image une place centrale dans la vie culturelle et sociale de Tahiti ».

De la tradition à la diffusion de cette tradition, du tatouage au peigne aux nouvelles technologies, cette exposition questionne et apporte ses réponses, définit ce qu’est être un artiste aujourd’hui à Tahiti et fait la part belle autant aux artistes polynésiens qu’aux regards décalés.

Le programme de ces quelques jours est riche : au-delà de l’exposition de peintures, de sculptures, d’encres de Chine, des happenings et des créations en directe sont organisés : sculpture à la tronçonneuse, séance de tatouage traditionnel au peigne, séminaire autour de ces aspects… Par ailleurs, cette rencontre d’artistes sera l’occasion de tourner un court-métrage à destination de la télévision, en attendant d'autres horizons, et notamment une exposition en Afrique et au Japon.

Venez au devant de ces artistes engagés à l’art fascinant : Jonathan Bougard, Chef Miko, Max Tohitika, Julien Magre, Moana Heitaa vous donnent accès à leur univers…

 

Quelques semaines après la première exposition Action Directe, le collectif CCCTP est accueilli au Papineau Building de Papeete par le GIE POR O RIKITEA pour une deuxième exposition. Dans le cadre d'une vente aux enchères de perles noires, cette exposition est privée et réservée aux négociants en perles accrédités.

En novembre 2014, le collectif CCCTP s'associe à Miguel Hunt qui représente la galerie l'Art en Fusion pour une exposition d'un fond d'oeuvres du grand sculpteur Vaiere Mara, toujours accueillis par le GIE POE O RIKITEA 

Article de Tahiti Infos pour l'exposition Mara organisée conjointement par la galerie l'Art en fusion et le Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete :

Une exposition à la mémoire du grand sculpteur polynésien Mara

PAPEETE, le 4 novembre 2014 - Mara est un sculpteur Polynésien qui a eu énormément d'influence de son vivant, mais qui sombre peu à peu dans l'oubli. Un fond de ses œuvres a été rassemblé et va être présenté au public avant la fin de l'année.

Les artistes du Centre de Création Contemporaine Teroronui de Papeete organisent une exposition mêlant les sculptures de Mara avec des œuvres contemporaines. En collaboration avec le GIE Poe O Rikitea, le Musée de Tahiti et des Îles et la galerie l'Art en Fusion, elle se déroulera en deux temps :
- Une exposition privée réservée aux négociants accrédités pour la vente du GIE Poe O Rikitea aura lieu du jeudi 6 novembre au mardi 11 novembre
- Une exposition publique au Musée de Tahiti et des Iles puis à la galerie l'Art en Fusion au centre Vaima à Papeete, pour début 2015

Une vingtaine d'œuvres de Mara seront présentées au GIE, issus du fond assemblé par le galeriste et peintre argentin Miguel Hunt, surtout des masques en corail. En bonus, quelques œuvres contemporaines de Teva Victor, Stéphane Motard, Julien Magre, Yanick Margerit, Jonathan Bougard et Miguel Hunt seront exposées.

D'autres œuvres de Mara devraient être disponibles pour l'exposition publique, prêtées par des collectionneurs. Ces négociations expliquent l'absence de dates définitives pour l'exposition publique.

Un artiste majeur de l'art brut qui ne doit pas être oublié

Vaiere Mara est né à Rurutu en 1936. Arrivé à Tahiti à l'âge de 10 ans, il commence la sculpture à 18 ans en tant qu'élève du maître de la sculpture, Kimitete. Son succès a rapidement dépassé les frontières de la Polynésie et les amateurs d'art du monde entier, américains en particulier, ont vite été conquis par son travail.

Le gouverneur Sicurani, en Polynésie de 1965 à 1969, avait acheté plusieurs œuvres de Mara à titre personnel. Il qualifiait l'artiste de génie. Patrick O'Really, animateur de la société des océanistes, lui consacrera un ouvrage et ira jusqu'à présenter une dizaine d'œuvres à Jean Dubuffet, père de l'art brut en Europe. Mara est décédé à l'été 2005, et pour ne pas que son œuvre sombre dans l'oubli plusieurs initiatives sont nées : le galeriste et peintre argentin Miguel Hunt réunit donc ce fond d'œuvres et contacte les institutions, et les artistes poussent à la création d'un musée Mara.

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Mardi 4 Novembre 2014 à 16:33 

Article de la Dépêche de Tahiti du 8 novembre 2014

Reportage Mana Culture sur l'exposition :